Des sourires et des larmes.

C'est enfin le grand jour, je me lance pour rejoindre Rouen, ville étape de mon itinéraire. La première journée est rude : 90 kilomètres sous le soleil, le thermomètre affiche 37°C. Première nuit en camping à Ivry-la-bataille au bord d'une petite rivière.
Le lendemain je repars en début d'après midi, pas très judicieux avec cette canicule. Je roule de village en village afin de trouver un petit coin paisible où passer la nuit mais rien de sécurisé pour le vélo. Je décide donc de planter ma tente chez l'habitant. Le long de la rivière j’aperçois un loueur de canoë, "Au plaisir de mon moulin". Je rentre pour y trouver la propriétaire des lieux. Un large sourire, une courte présentation en allant droit au but et me voilà installé sur un petit coin d'herbe au bord de l'eau. En bref, un super cadre pour camper.
Ce soir, 40 élèves d'un collège voisin préparent leur soirée de fin de séjour. L'apéritif et le couvert me sont généreusement proposés par l'équipe du site. Une agréable soirée se profile à l’horizon.
Le lendemain, après le déjeuner, me revoilà parti. Je pédale jusqu’au lac de Livry-Poses où je trouve un petit camping pour passer la nuit.
Au réveil, première galère, ma batterie externe ainsi que mon chargeur ont disparu. Une très mauvaise journée qui commence...
Vendredi matin : direction Rouen car il est prévu que je dorme chez l'habitant via l'application “couchsurfing”. Arrivé à destination, je fais la rencontre de Margaux, mon hôte pour cette nuit. Nous mangeons ensemble puis nous rejoignons Steve, un ami à elle. Nous voilà partis pour me faire découvrir le magnifique centre ville. Margaux se révèle être une personne géniale, grande amatrice de café et de produits laitiers. Une super rencontre qui alimente mon expérience.

La prochaine ville étape : Etretat pour admirer les splendides falaises. Sur la route j'empreinte le bac de Yainville, petit ferry servant à traverser la Seine d'une rive à l'autre. Je passe ensuite le pont de Brotonne à l'est de Caudebec. Après cette traversée, j’aperçois une longue montée que je gravis. Basse vitesse, bas plateau, la chaine déraille. En manipulant le vélo le dérailleur s'arrache du cadre. Il fait chaud, la côte est encore longue et aucun village à l'horizon. Je prends la décision de pousser le vélo durant 9 longs kilomètres, au bout desquels je fais connaissance avec la petite commune de Louvetot. Mais je n'ai aucun endroit pour dormir et rien à manger, je craque. Sur le GPS, il m'est indiqué Yvetot (la plus grande ville des alentours) je me prépare psychologiquement pour 7 km de marche. Avant de quitter Louvetot, une boulangerie apparait. Je m'y arrête pour me ravitailler mais malheureusement la vitrine est presque vide. Lorsque je ressors, 3 garçons observent mon vélo, j’entreprends alors de leur expliquer mon problème.
Benjamin, l'un des trois, appelle son grand-père qui n’est qu’à quelques mètres de là pour lui demander son aide. Tout de suite Philippe m’invite à venir chez lui pour regarder cette panne de plus près.
30 minutes plus tard et après quelques coups de tarot et de tourne vis le vélo est réparé : je retrouve enfin le sourire. Philippe et sa femme me proposent le gîte et le couvert et nous passons une excellente soirée ! Le lendemain matin me voilà de nouveau sur la route, cependant triste de quitter cette adorable petite famille avec laquelle j'étais si bien.

Dimanche, j’arrive enfin sur la côte et le plaisir de voir la mer me gagne, ce qui va me permettre de souffler un peu. Je roule à la recherche d’un petit coin tranquille sur la digue pour poser mon vélo quand d'un seul coup la roue avant passe entre deux lattes de bois et *CRACK* la fourche casse ! Je suis au sol, rien de cassé pour moi mais je constate avec désarrois que la fourche s’est arrachée et cassée en deux morceaux et là, je sais que c'est la fin. Les larmes montent, je regarde mon vélo en ne sachant que faire. Un homme me propose gentiment de m'amener au camping.
Benjamin, mon sauveteur de Louvetot m'envoie un message pour savoir comment se passait ma journée. Je lui explique alors ma chute et quelques minutes plus tard, appel de Philippe qui se propose de venir me chercher. J'accepte difficilement son geste mais il ne veut pas me laisser seul avec le vélo cassé. Malgré leur gentillesse je ne peux m'empêcher de penser à la fin de mon aventure.
Retour à Louvetot. Je rencontre d'autres membres de la famille tout aussi chaleureux. Je me sens presque chez moi.

Après une bonne nuit de sommeil, Philippe m’emmène découvrir les environs : la ville de Caudebec et tant d’autres richesses normandes. L'après midi c'est visite des falaises d'Etretat. Puis, en fin de journée une amie, au combien gentille, vient me chercher pour rentrer à la maison.
Une fois toute mes affaires chargées, c'est l’heure des aurevoirs. Dernières photos, derniers petits instants avec eux puis nous prenons la route vers chez nous.
Le retour est très dur. Mes émotions sont partagées et mes pensées très chargées. A la fois car je songe à l’état de mon vélo et à l’arrêt si brutal de mon aventure mais également et surtout à cette famille, cette extraordinaire famille qui a su m’ouvrir ses portes et son cœur avec une telle générosité et une réelle volonté d'aider. Ce sont ces liens si forts qui se sont créés entre nous, qui resteront gravés et que je ne pourrais jamais oublier.


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